MBOG BASSA XVè-XIXè siècles: Pouvoir judiciaire, UM

Dans leurs longues migrations et leurs perpétuelles évolutions , les SAA ont toujours voulu éviter le pouvoir autocratique. C est ainsi qu au concile de Lituba, une profonde réforme fut engagée. Cette réforme tout en renforçant la démocratie, permit d' annexer des grands coprs d Etat aux différents ordres initiatiques. C est ainsi qu apparurent de nouveaux champs d application des différentes initiations.

-Le Matouk1= Pouvoir législatif=Hommes -panthères

-Le Um=Pouvoir judiciaire= hommes serpents d’eau

-Le Ngue1=Pouvoir exécutif=Hommes- léopards

-Le Kwakwe1=Pouvoir militaire=Hommes- lions ailés

-Le Koo1=chambre féminine=Femmes escargot

Conseil féministe, économique , social

- Le Kobi =Conseil dEtat

         L' ordre initiatique et symbolique des sept rayons d'Or du serpent d eau UM, avait reçu charge de former les magistrats de la noble dynastie solaire. Gardien de la Porte du Savoir, il dispensait des enseignements dans sept disciplines fondamentales. En voici quelques unes

Ma’UM : poésie orale lyrique,code ésotérique

A’UM : Théologie, Religion, Hermétisme du Monothéisme Elolombiste-Nyambéiste

etc…

Mais notre propos porte ici sur l appareil judiciaire et non sur l' ordre initiatique lui-même

                               …Organisation et Fonctionnement

(…)Alberto ONGARO : Mais, quand donc les hommes-léopards surgissent-ils pour châtier quelqu'un?

Dignitaire Bassa : Quand les lois du MBOG sont violées. Nous les faisons respecter en dépit des lois officielles, qui pour nous viennent d'Europe, les lois des Blancs (…) Il y a deux Afrique, Tumbaba, l'ancienne, et celle qui est en train de naître. Chacune d'elles a ses lois.

Alberto ONGARO : Mais quelles sont les lois du MBOG?

Dignitaire Bassa : Impossible de vous les dire toutes ! Si un homme dans la forêt, en vole un autre, le trompe, lui enlève sa femme ou lui frappe son père, croyez-vous que se sont les tribunaux officiels qui vont le punir ? Ce ne sont pas eux non plus qui vengeront la femme abandonnée, ni châtieront l'homme jeune qui, sans témoins, frappe ou tue un vieillard(…)

(…). Le jour suivant, le coupable trouvera, plantée devant sa case, une branche de bananier portant une plume rouge de perroquet. Il sera blessé; s'il a blessé, tué s'il a tué. Inutile de fuir(…)

(…) Tu veux savoir ce que sont vraiment les hommes léopard? Eh bien, ils sont en fait la police secrète de l'Afrique noire, ceux qui frappent le coupable que nos tribunaux ont condamné. Non certes les tribunaux à la mode des blancs, mais ceux de la forêt, des lacs et des montagnes. Nous sommes le bras armé de nos chefs traditionnels. Nous existons depuis des siècles. Peut-être sommes-nous aussi anciens que l'Afrique elle-même. Ici, on nous appelle bagengé,nyéngwat ou mayman; ailleurs nous sommes wahokehoko, simba, et autres.

(…) Voilà ce que nous sommes : les défenseurs de cette tradition africaine si durement frappée, et qu'il faut sauvegarder pour que l'Afrique reste l'Afrique ! 2

         Dans cette interview, nous avons une brève mais brillante présentation de trois des cinq institutions politiques : MBOG, NGUE et UM

            L’institution UM est l’une des institutions politiques majeures du MBOG BASSA. Il s’agit de l’institution judiciaire dont l’importance dans une civilisation n’est plus à démontrer.UM est la moins connue des institutions, moins étudiée que l’institution le Matouk. Pourtant sa mission de protection fut primordiale pour l’existence de l’Etat démocratique BASSA.C’est à dire un Etat garant des libertés individuelles et collectives et responsable de la sécurité des biens et des personnes.

  Le UM était dirigé par le BATUM, Juge ou Procureur général  qui était assisté par sept juges supérieurs : les Basan UM. Les Basan UM étaient placés à la tête des 7 chambres judiciaires que nous allons énumérer :

1-MBAM UM = Chambre correctionnelle

2-DJEM UM = Chambre pénale

3-MANGAMBA UM= Chambre commerciale

4-DIGONDA UM = Chambre Civile

5-NTON UM=Chambre pisicole

6-NKOL UM= conseil de prud’homme

7-DIKAD UM= Sorte de Gruerie

Comme leurs noms l’indiquent, chacune de ces chambres avait une fonction définie et siégeait dans les circonstances bien définies. De même que la composition de chaque chambre judiciaire était précise. Nous allons prendre l’exemple de la chambre pénale : DJEM UM

                                  DJEM UM : La chambre pénale

     DJEM vient du mot DJEM3 en BASSA qui signifie crime, assassinat, meurtre etc… Cette chambre siégeait donc dans les circonstances relevant du pénal. Les peines retenues dans le code pénal des bassa étaient entre autres :

1°-L’exclusion temporaire ou définitive du groupe, avec comme conséquence, la certitude de devenir :

-un prisonnier dans une forêt isolée du reste de la

Communauté, (Mok)

-un apatride ou même un esclave dans un groupe ethnique voisin.

2°- La peine de mort, dont l’exécution était confiée aux membres de l’institution NGUE(Hommes léopard)

    La hache(Hond) dont se servait le MBOMBOG HOND KENA (Magistrat Législateur) pendant les audiences, symbolisait un jugement avec appel ou sans appel. Si après la délibération, la hache était plantée dans le sol, ceci signifiait au coupable que le jugement et le verdict étaient sans appel. Dans le cas contraire, le prévenu pouvait faire appel du jugement, demander une nouvelle enquête. Nous pouvons conclure par l’usage de cette hache que : les notions d’appel, d’expertise et de contre expertise étaient bien présentes dans l’organisation judiciaire des BASSA. Que cette justice était basée sur les faits matériels et non sur les opinions et les apparences. En outre, le prévenu était assisté par le MPODOL, sorte d’Avocat commis d’office.

      Nous pouvons aussi rappeler que dans le cas où la recherche des indices matériels restait infructueuse, la chambre pénale, c'est-à-dire le Mbombog Hond Kena et les Um Um (jurés) faisait appel aux institutions NGAMBI dont le symbole est l’araignée et NJEK dont l’emblème est le Cactus. Les membres de ces deux institutions opéraient sur un autre plan ; ils étaient, pour des premiers, chargés de trouver par les sciences divinatoires le ou les coupable(s ), et pour les seconds d’appliquer le châtiment compensatoire ; c’était donc des justiciers occultes.

L’utilisation des procédés et des méthodes irrationnels pour atteindre le résultat, jette un sérieux discrédit sur ces deux institutions(Njek et Ngambi). Par leurs méthodes de travail, on peut imaginer le nombre d’erreurs judiciaires commises.

   Le fonctionnement du UM comme institution politique, nécessitait donc la participation des membres des autres institutions :Les Mbombog ;Les Ngué ; et même parfois les prêtres-médecins comme les Ngambi et les Njek.

    Cette dépendance a rendu cette institution plus fragile et plus vulnérable que les autres. Son affaiblissement ne provient pas uniquement de la colonisation, mais aussi des rivalités entre les différentes institutions du système politique du MBOG BASSA. En effet, le UM, en termes de consultations, avait une primauté pour la désignation des autres responsables politiques. Détenteur du casier judiciaire, c’est au UM que revenait l’honneur d’accorder ou de refuser l’intronisation d’un responsable politique.Ne pouvant plus garantir de la probité et la moralité des candidats aux différents postes de responsabilité ; il en découle que de nos jours, les responsables traditionnels sont de plus en plus contestés. Enfin la capitale de l’institution UM était ESEKA et sa langue de travail était le Mbene ( mè a)

                                        Organigramme du UM

 

                           

             Le UM était dirigé par un procureur général  Batum , qui était assisté par 7 juges supérieurs Basan Um.Chacun de ce juges étant le référent dans son domaine .Au niveau provinciale ou dans les grande collectivités lignagères,se tenait le Nu- UM.

                                             ...Présent et Futur

Avant de clore cet exposé sur le pouvoir judiciaire, .Il revient cette réponse du dignitaire Bassa :

(…) Il y a deux Afrique, Tumbaba, l'ancienne, et celle qui est en train de naître. Chacune d'elles a ses lois.(…)

Il y a effectivement deux Afrique grand père. L’ Ancienne, fruit d’une construction méthodique et étalée sur des millénaires, celle qui nous unit à vous et à nos enfants ; représentée par le tribunal coutumier et le conseil du village. L’autre,la Nouvelle, celle que tu as vu naître, issue d’ une gestation courte et d’une naissance tragique et violente, incarnée par le tribunal de grande instance. Dans la logique de la civilisation africaine, et suivant le principe LIJOH (l’Unité dans la Dualité) de laspiritualité des SAA, nous ne rejetons aucune, nous entretenons ces deux Afrique. Mais nous savons tous que : Chacune d’elles a ses lois.

I kété li nyang

Francis

(1) les autres pouvoirs seront aussi étudiés ultérieurement

(2)Extraits de l’interview qu’un membre du NGUE accorda à Alberto ONGARO dans le magazine « Lecture pour tous »

(3) lire djèm et non djém (grossesse)

(4) Certaines sources évoquent des assemblages avec d’autres matériaux.

Bibliographie :

--Eléments du droit coutumier Bassa- J. Kohler- Berlin 1896

-Bassalogie du Dr NOUK BASSOMB

-Les fils de Hitong –Professeur Ngidjol Ngidjol

-Magazine « Lecture pour tous » N°223-Aout 1972

-Monographie sur la nationalité Basa –Professeur Dika Akwa-1980

-Evolution des structures politiques au cœur de l’Afrique-IXè-XIXè siècle-Prof DIKA-1970

-NKAAMBOK – Du patriarche NGUE Louis

-Article de MBOMBOG KEND Bogart-

« Natures et formes de pouvoir dans les sociétés dites acéphales »-Résume du Colloque Yaoundé-Mars 1978

avec la participation des professeurs : Titi Nwel, Bikoi Tam, Soundjock

-Sources orales

 

 

 

 

 

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